Rejette le faux savoir
絕聖棄智，民利百倍；
絕仁棄義，民復孝慈；
絕巧棄利，盜賊無有。
此三者以為文不足，故令有所屬：
見素抱朴，少私寡欲，絕學無憂。
Proposition de traduction
Rejette la sagesse des sages, abandonne l’intelligence rusée —
le peuple en recevra cent fois plus de bienfaits.
Rejette la bienveillance et la justice —
le peuple retrouvera la piété et la tendresse.
Rejette l’habileté et le profit —
et il n’y aura plus ni voleurs ni brigands.
Ces trois propositions ne suffisent pas à fonder une voie.
Il faut aussi :
voir le brut, embrasser le simple,
réduire les désirs, diminuer le moi.
Abandonne l’étude — tu seras sans inquiétude.
Commentaire
Ce chapitre poursuit directement le précédent. Là où le Dào a été perdu, on a surcompensé :
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Par le faux savoir (智 zhì),
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La fausse vertu (仁 rén, 義 yì),
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Le faux progrès (巧 qiǎo) et le profit (利 lì).
Mais ces valeurs, quand elles sont prêchées au lieu d’être vécues, deviennent des parodies creuses.
1. 絕聖棄智
Abandonne les “sages” et les “intelligents”.
Ceux qui prétendent gouverner avec ruse ou organiser la morale ne font qu’aggraver la fracture.
2. 見素抱朴
Regarde la soie brute, serre contre toi le bois non sculpté.
Une des plus belles images du Dào Dé Jīng :
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素 : la simplicité naturelle, la soie non teinte,
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朴 : le bois brut, intact, dans sa pure potentialité.
C’est une invitation à revenir à ce qui est entier.
Résonnance contemporaine
Lǎozǐ n’est pas contre la vertu réelle, mais contre sa codification, sa transformation en éthique affichée et instrumentalisée.
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Moins on parle de bonté, plus elle peut être vécue.
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Moins on parle de loi, plus l’équilibre peut émerger.
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Moins on veut contrôler, plus la paix peut apparaître.
Le Dào n’est pas une morale,
c’est l’émergence spontanée d’un ordre vivant,
qui s'efface dès qu’on le nomme.